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BRÈVE HISTOIRE DES KHMERS ROUGES

Vous avez dit Khmer rouges !?

Il est nécessaire de rappeler que ce sobriquet "Khmers rouges" fut donné par le Prince Norodom Sihanouk en 1951 pour désigner les communistes khmers.

Ceci par opposition aux « Khmers roses » du Parti démocrate, aux « Khmers bleus » réclamant la formation d'une république et aux « Khmers blancs » les royalistes.

Ainsi, à l'Assemblée nationale de Phnom Penh, Norodom Sihanouk prenait un malin plaisir à désigner chaque courant politique par l'un de ces sobriquets.

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Alors, revenons sur l'histoire des Khmers rouges !


Car ces 50 dernières années, il y a eu beaucoup de confusions et de contre-vérités. Il est donc nécessaire de clarifier l'histoire du mouvement "khmer rouge", depuis sa genèse, et son implication dans les drames du pays.

Qui étaient-ils vraiment ?

Où ont-ils été formés et par qui ?

Pourquoi étaient-ils le bras armé du Prince Norodom Sihanouk, de 1970 à 1998, avec le soutient des Chinois et des Occidentaux, sous l'égide de l'ONU ?

Découvrez les réponses à ces questions et bien plus encore.

Genèse - Khmers Issarak (1940 - 1946).

Durant la guerre d'Indochine, le Việt Minh réorganise ses alliés parmi les Khmers et les Laotiens dans le but de structurer les guérillas communistes locales. Chacun des mouvements indépendantistes des trois pays de l'Indochine française doit alors être doté d'un parti distinct du Parti communiste indochinois (PCI, fondé en 1930).

Et des idées nationalistes germent dans la tête des jeunes diplômés Khmers que ce soit en France ou au Cambodge. Les premières réactions sont venues des élèves du lycée Sisowath à Phnom Penh, rébellion contre les Français en 1936, puis, au début des années 40.

En 1940, le mouvement indépendantiste des Khmers Issarak est né (littéralement Khmers indépendants ou Khmers libres), dont le seul objectif est de bouter les Français hors du pays et d'obtenir l'indépendance.

Les forces du mouvement, fondé à Bangkok, sont soutenues par le gouvernement thaïlandais. En échange, les Khmers Issarak constituent des groupes de guérilla qui harcèlent les avant-postes français dans le cadre du conflit territorial avec l'Indochine française.

Au fil du temps, Les Khmers Issarak sont moins actifs et se divisent en plusieurs groupes indépendantistes distincts : "non-communistes", soutenus par la Thaïlande ; et "communistes" formés et armés par les Viêt-Minh, qui souhaitent développer l'activité de guérilla au Cambodge pour en faire une « région de soutien logistique » à la guérilla en territoire sud-vietnamien.

Association des Étudiants Khmers - AEK (1946 - 1954)

Jusqu'en 1946, Sihanouk a en main tous les atouts pour réussir le développement de son pays : adhésion populaire, espoir de l’élite prête à coopérer, rassemblement politique autour de sa personne, promesse d’aides étrangères multiformes. Mais c'était sans compter sur le pouvoir de nuisance de l'Association des Étudiants Khmers (AEK) en France.

Au début, ce groupe de jeunes étudiants ne semble pas politisé, mais l’esprit nationaliste y règne, et revendique l’indépendance du pays, « ce qui agace les Français ». Le célèbre architect Vann Molyvann, centriste, est également un solide pilier de l'association.

Le siège se trouve au pavillon de l’Indochine, à la Cité universitaire de Paris.

Tandis que leurs camarades, plus jeunes, sortis des lycées de Phnom Penh, de Saigon et de Hanoi, font en France l’expérience de la démocratie. Pour la plupart boursiers du gouvernement royal, ils réagissent différemment à l’environnement politique : certains demeurent à l’écart de toute agitation, d’autres militent au Parti Communiste Français (PCF) et suivent les formations de l’université populaire du parti. Notamment, les futurs chefs khmers rouges :

  • Ieng Sary, (អៀង សារី, se prononce "Irng Sari"), beau-frère de Saloth Sar, qui étudie à Sciences Po Paris. En 1946, il a fondé le mouvement « Libération du Cambodge du colonialisme français », un des premiers groupes étudiants indépendantistes du pays.
  • Saloth Sâr dit Pol Pot, (សាឡុត ស, se prononce Sa'lote Sâ) qui étudie à l'École française de Radioélectricité Paris, de 1949 à 1953, sans obtenir de diplôme. Il découvre la politique dans les rangs de l'AEK, et devient très actif au sein du PCF. Il se lie d'amitié avec Jacques Duclos, (second du PCF) qui devient son mentor.
  • Khieu Samphân, (ខៀវ សំផន, se prononce Khiouw Sâmphâne), il adhère au PCF et succède à Ieng Sary à la tête du "Cercle marxiste". Il étudie à la Faculté de Paris, où Il rédige sa thèse de sciences économiques, dédiée à Norodom Sihanouk. Thèse qui servira de support à la mise en place d'une collectivité agraire sous le régime de Pol Pot.
  • Ieng Thirith, (អៀង ធីរិទ្ធ, se prononce Irng Thirreut) épouse Ieng Sary et belle-sœur de Saloth Sâr. Étudiante zélée et marxiste jusqu'au bout des ongles, elle influence et endoctrine les nouveaux membres de l'association. 
  • Hu Nim, (ហ៊ូ នឹម, se prononce Hou Nœm), le matin, i il étudie le droit et l’économie à la faculté de Paris ; le soir, à l'Ecole des Douanes.
  • Hou Yuon, (ហ៊ូ យន់, se prononce Hou Yone); il étudie le droit et l’économie à la faculté de Paris.
  • Son Sen, (សុន សេន, se prononce Sone Sène), Il fait d’abord un stage à l’École Normale de Melun puis monte à Paris où il fait une classe préparatoire en lettres à la Sorbonne

Puis, en 1950, au sein de l'AEK, trois mouvements sont créés : les démocrates, les centristes et les marxistes.

 

En 1951, sous le nom de Parti Révolutionnaire du Peuple Khmer (PRPK), le Parti communiste khmer est né. Il est placé sous la présidence de Son Ngoc Minh, chef du mouvement Issarak communiste et indépendantiste. Durant les trois années précédentes, la plupart des cadres du PRPK ont suivi, auprès des Vietnamiens, des cours de formation au marxisme-léninisme et d'apprentissage de la guérilla. 

Les premiers statuts du parti font néanmoins référence au socialisme, et non au marxisme. Les décisions demeurent contrôlées à tous les niveaux par les communistes vietnamiens qui composent une partie non-négligeable des effectifs. Ainsi, dans la cellule de Phnom Penh de 1952, 27 des 34 membres sont vietnamiens, 3 sont Chinois et 4 seulement sont Khmers.

En France, dans la foulée, la cellule marxiste de l’AEK prend la direction de l'association, Ieng SaryKhieu Samphan et Saloth Sar en sont les principaux membres influents.

A partir de 1952, Norodom Sihanouk s’emploie, par tous les moyens, à détruire les différentes forces politiques opposantes du pays, afin de règner en maître. Mais les indépendentistes, de plus en plus nombreux, l'obligent à négocier avec les Francais.

Le 9 novembre 1953, l’Indépendance du Cambodge est proclamée. Norodom Sihanouk s'attribue cette victoire.  Ainsi, ni Son Ngoc Minh (Issarak communiste), ni Son Ngoc Thanh (Issarak libéral) n’ont pu libérer le Cambodge du Colonialisme français, laissant tous les honneurs de l’œuvre au Roi Norodom Sihanouk qui, au titre de sa “Croisade royale pour l’Indépendance”, a pu obtenir la victoire. Une croisade bien tardive diront certains.

Le 3 mars 1955, le roi Norodom Sihanouk abdique en faveur de son père et prend le titre de Chef de l’État. Il conserve son statut de Prince. Il crée son propre parti politique, le Sangkum Reastr Niyum, qui remporte la totalité des sièges aux élections, au terme d’une campagne électorale où toute opposition a été brutalement réduite au silence.

Norodom Sihanouk se méfie également des étudiants Khmers, en France. Ainsi, le 9 février 1953, l’AEK est dissoute par le gouvernement français, à sa demande.

Et Saloth Sâr (Pol Pot) rentre au Cambodge, mais Ieng Sary et Khieu Samphân continuent l'endoctrinement des jeunes élèves venus en France.

Le 20 février 1954, c'est la reddition des chefs Issarak, les membres se dispersent dans le maquis et créent des camps d'entraînement pour la guérilla.

 

La résurrection de l’association : l’Union des Étudiants Khmers - UEK (1956 - 1960)

En 1956, c'est la résurrection de l’association !

Certes, sous un autre nom, mais sous l'égide de "Ieng Thirith".

À Paris, l’Union des Étudiants Khmers (UEK) est créée officiellement le 26 novembre 1956. Cette fois, la tendance est franchement communiste. In Sokan, président de l'association, sera aidé pendant son mandat par Khieu Samphan et Ieng Sary et qui ne cachent pas leur sympathie envers Norodom Sihanouk. Ils prônent même : l’union nationale autour de la politique de paix, d’indépendance nationale et de neutralité dirigée par Norodom Sihanouk, le chef d’État.

Le programme politique affiché par l’UEK, qui met l’accent sur la lutte anti-impérialiste américain, rassure les jeunes étudiants, flattés dans leur orgueil national et personnel à l’idée que leur petit pays s’élève contre une superpuissance. 

En 1958, l’UEK appelle les candidats aux élections à maintenir l’union autour du chef de l’État, afin d'éviter, au cours de la campagne électorale, tout incident permettant aux étrangers de s’immiscer dans les affaires du Cambodge.

Alors Norodom Sihanouk recrute Hu Nim, Khieu Samphân et Hou Yuon, pour créer une opposition parlementaire, capable de contrecarrer l’aile droite de son mouvement (le Sangkum Reastr Niyum) pro-américaine. Après leur victoire aux élections, ils occupent plusieurs postes ministériels dans les gouvernements successifs de l’époque. Les talents d’orateur de Hu Nim lui valent même d’accéder en 1961 à la vice-présidence de l’Assemblée nationale.

Ce qui renforce le succès des communistes au sein de la communauté estudiantine khmère. Succès qui n'est point lié à un consensus politique, mais à un accord contre ceux qu'ils considèrent comme "les pires ennemis du Cambodge", les Américains qui essayent de déstabiliser l'organe gouvernemental.

Mais, à l'époque, les effectifs des Khmers rouges sont insignifiants, les actions de commando sont sporadiques et sans grande efficacité.

Nota : Il y eut de nombreuses associations Khmères, en France et en Europe, mais leurs influences dans l'histoire du Cambodge n'ont pas eu les mêmes impacts que l'AEK et l'UEK.

Le coup d'État et accords avec la chine et le Vietnam

En 1966, des députés communistes sont nommés, par Norodom Sihanouk, à des postes ministériels : Hou YounKhieu Samphan, Hu NimBien que nommés, ils sont menacés par les hommes du prince, parfois battus et emprisonnés. Et les éléments de droite en place au gouvernement ne cessent de les humiliés. ils abandonnent leurs fonctions en 1967 et 1968 pour se réfugier dans le maquis.

Progressivement, Norodom Sihanouk doit faire face au mécontentement des citadins. Notamment à partir de 1968, concernant le ravitaillement des Viets-Congs en riz, et l’implantation de leurs bases dans l'est du pays, principalement dans les plantations d'Hévéas (les villages situés entre les communes de Chup jusqu'à Menot, et le long du Mékong) ; leur permettant de se ravitailler, en armement et en munitions, afin de combattre au Sud-Vietnam.

Pistes ho 1 1

Nota  : en rouge, la piste Hô Chi Minh / en vert, les pistes de ravitaillement des Viêt-Cong et des Khmers rouges à partir du port de Sihanoukville.

Les finances nationales sont au plus bas, les rizières sont détruites par les bombardements américains, et la population peine à se nourrir.

Une révolte gronde autour de la présence vietnamienne sur le territoire.

Le 17 mars 1970, alors que Norodom Sihanouk est en déplacement à l’étranger (Paris, Moscou et Pékin), des proches du gouvernement de Lon Nol, alors Premier ministre, ont délibérément incité la jeunesse khmère à se révolter contre la présence des civils Vietnamiens sur le territoire, entraînant des troubles violents, faisant des milliers de victimes. À l'issue de ce pogrom, les corps de centaines de Vietnamiens dérivent sur le Mékong vers le Sud Vietnam.

Le soir même, Lon Nol convoque quatre de ses ministres – Sirik Matak, Op Kim Ang, Chhan Sokhum, Un Trâmuch – pour comprendre l’origine de cette révolte. Les quatre ministres profitent de cette rencontre pour demander la révocation du chef de l’État, Norodom Sihanouk. Qu'ils considèrent comme trop conciliant avec les Vietnamiens.

Ainsi, dès l’aube, le 18 mars 1970, les troupes gouvernementales investissent la capitale, et l’aéroport de Phnom Penh est fermé. L’Assemblée nationale, réunie au petit matin, traite d'abord les affaires courantes. Vers 11 heures, les députés sont invités à discuter du «cas Norodom Sihanouk», puis à voter la destitution de sa fonction de Chef d'État.

Cheng Heng, alors président de l'Assemblée nationale, est nommé chef de l'État par intérim, tandis que Lon Nol, en tant que Premier ministre, est investi de pouvoirs d'urgence, alors que Sirik Matak conserve son poste de vice-Premier ministre. Le nouveau gouvernement affirme que le transfert du pouvoir est tout à fait légal et constitutionnel, alors que Norodom Sihanouk, en colère, crie le contraire.

Le nouveau régime, de droite, nationaliste, anticommunistes, anti-vietnamiens et pro-américain, stoppe toute coopération clandestine avec le régime nord-vietnamien et le Viêt-Congs, et apporte, au contraire, son soutien aux Américains dans le cadre de la guerre du Viêt Nam.

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À son arrivée à Pékin, le 20 mars 1970, Norodom Sihanouk est accueilli par Zhou Enlai. Norodom Sihanouk est conviée à une entrevue avec les dirigeants chinois. Ils lui promettent un soutien total de son pays s'il accepte d’engager le combat contre l’impérialisme ; ils lui accordent un délai de 24 heures pour réfléchir à la proposition.

En urgence, les dirigeants chinois invitent, à Pékin, le Premier ministre du Nord-Vietnam, Phạm Văn Đồng. Norodom Sihanouk le rencontre en présence de Zhou Enlai. Ils concluent une alliance tripartite (Chine - Vietnam - Cambodge) qui avalise l’acheminement de l’aide chinoise à la résistance khmère, et l’entraînement au Vietnam des troupes (Viêt-Congs et Khmers rouges) de cette nouvelle coalition.

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Le 23 mars 1970, Norodom Sihanouk, depuis Pékin, lance son appel aux armes. L'allocution radiodiffusée appelle le peuple Khmer à la résistance. Il demande à ses « enfants » de ne pas se soumettre aux lois de Phnom Penh, et à rejoindre l'armée révolutionnaire pour combattre les troupes de Lon Nol, l'usurpateur.

Il annonce également la création du Front National Unifié du Cambodge, doté d'une armée nationale de libération. Légitimant, de fait, les Khmers rouges comme principal bras armé de Norodom Sihanouk.

Le Gouvernement Royal d'Union National du Cambodge en exil est créé. Norodom Sihanouk assure la fonction de Chef d'État en exil et Khieu Samphân devient Premier ministre-adjoint, Ministre de la Défense et commandant suprême de l’armée révolutionnaire.

Norodom Sihanouk sauve la face en prenant la tête du front de résistance, permettant aux forces révolutionnaires de croître dans des proportions qu’elles n’auraient jamais pu espérer.

Si l’appel a peu de répercussions dans les villes, il n'en est pas de même des campagnes où la révolte gronde. Des manifestations et des émeutes ont également lieu, principalement dans les zones contiguës à celles contrôlées par les Vietnamiens (toute la partie Est du royaume).

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Dans la nuit du 26 mars, à Kampong Cham, des milliers de paysans détournent des bus – parfois avec leurs passagers – et des camions des plantations d'hévéas, pour se rendre à Phnom Penh, afin de manifester leur soutien à Norodom Sihanouk. 

Ils sont arrêtés aux abords de la capitale par des miliciens qui ouvrirent le feu. La foule en colère tue l'un des frères du Premier ministre, Lon Nol. Les paysans commencent alors à marcher sur la capitale, exigeant la restauration de Norodom Sihanouk à la tête de l'État. Ils sont durement réprimés dès leur entrée dans la capitale, et dispersés par l’armée de Lon Nol qui a reçu l’ordre de tirer sur la foule.

L’affrontement, d’une violence extrême, fait de nombreuses victimes. Et la nouvelle se répand dans tout le pays : « Les paysans offraient leur poitrine aux balles des soldats de Lon Nol. À leur cou pendait l’effigie du Roi », crie-t-on dans les campagnes.

Ce fut une plaie ouverte à jamais, dans le cœur de milliers de paysans, creusant un abîme de haine entre eux et les habitants des villes. C'est le début de la première guerre civile. 

Le 10 avril, Hu Nim, Khieu Samphân et Hou Yuon, apportent leurs soutiens au front dirigé par Sihanouk et demandent aux paysans Khmers de rejoindre les maquis.

Début 1971, la France s'engage auprès de Norodom Sihanoulk, en lui promettant de tout faire pour renverser le gouvernement de Lon Nol, afin qu'il puisse revenir au pouvoir. Ainsi, dans le plus grand secret, la France déploie des conseillers militaires (plus exactement des officiers du SDECE), et commence à armer et à financer les Khmers rouges. Dès lors, des cargos venant de France et de Chine approvisionnent régulièrement les Khmers rouges et les Viêt-Congs via le port de Sihanoukville.

Les forces Khmers rouges (1970 - 1975).

Les forces khmers rouges de la première heure, sont issues, en majorité, des gens des campagnes condamnés à vivre sous les bombardements intensifs de l'US Air Force. Ils n'ont qu'une alternative : l'exil vers les grandes villes ou bien rejoindre la révolution pour combattre le gouvernement de Lon Nol.

Environ deux millions de paysans préfèrent se réfugier à Phnom Penh, alors que 80 000 paysans optent pour le combat, dans le but de soutenir le Prince Norodom Sihanouk à reprendre le pouvoir. Ainsi, fort de ses milliers de combattants, des camps militaires et des bataillons de combats sont créés dans les différentes provinces du royaume. Notamment les bataillons de protection des frontières, chargés d'empêcher les Sud-vietnamiens et les Américains de pénétrer au Cambodge.
 

Fin 1973, environ 90% du territoire est déjà sous le contrôle des Khmers rouges (voir carte ci-après). 

Carte de libe ration

 

Nota : en rose, les zones gagnées / libérées par les Khmers rouges. Les soldats de Lon Nol n'assurent plus le contrôle du pays et se regroupent en périphérie de la capitale.

Malgré le déluge de bombes américaines, cela n'empêche pas les forces Khmers rouges d'obtenir la reddition du gouvernement de Lon Nol, le 17 avril 1975, lors de la chute de Phnom Penh.

Génocide /Angkar (1975 - 1977).

Les Khmers rouges prennent le pouvoir et le Cambodge Démocratique est proclamé. Norodom Sihanouk devient officiellement le chef de l’État. Les jours suivants, Norodom Sihanouk reçoit tous les honneurs, à Paris. Le Président de la République Française, Giscard d’Estaing, le félicite d’avoir légitimé la victoire des Khmers Rouges auprès de l’ONU.

Mais, lorsque Norodom Sihanouk revient à Phnom Penh, il doit démissionner de sa fonction, rendant le pouvoir au peuple. Il a accompli son rôle historique ; sans lui, la victoire n’eût pas été possible, mais après la victoire, il doit s’effacer, devenant un « hôte ordinaire ». Il est assigné à résidence surveillée, avec sa famille, au Palais-Royal. Les derniers membres de la famille royale encore à Phnom Penh furent envoyés dans des coopératives en province. Beaucoup sont exécutés. Sauf ceux qui, comme Sihamoni et Narindrapong, poursuivaient leurs études à Pyongyang et à Moscou.

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Alors, le peuple khmer subit les persécutions, les exécutions systématiques, et les travaux forcés... 

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Là encore, il faut clarifier les choses ! 

Au sein de l'organisation des Khmers rouges, on trouve deux structures bien distinctes :

  • D'une part, les principaux chefs Khmers rouges et leur idéologie génocidaire, tels que : Saloth Sâr (Pol Pot), Ta MokKhieu SamphanNuon CheaIeng SaryIeng Thirith, Kang Kèk Leu (Douch) ; et des centaines de fanatiques qui obéiront aveuglément à leurs ordres, souvent par vengeance, pour avoir été opprimé durant la guerre civile. Parmi ces fanatiques, on trouve les chefs de camps de travail (pour le peuple des campagnes), les chefs de camps de rééducation (pour les citadins), les tortionnaires et les commissaires politiques.
  • D'autre part, les officiers qui commandent les unités des dix régions militaires, dont la mission est de défendre le pays contre les agressions extérieures. Qui, en aucun cas, n'ont pas commis de crimes durant cette période. C'est dans ces rangs que des officiers dissidents fomentent une rébellion contre le régime.

Zones militaires

 

Nota: Les dix zones militaires sur le territoire du Cambodge Démocratique.

Officiers dissidents - Libération (1977 - 1979).

Pour faire face à la folie de Pol Pot, de nombreux officiers khmers rouges se révoltent, puis font dissidence afin de constituer une force de libération soutenue pas l'armée vietnamienne. Parmi eux les commandants : Hun Sen, Meas Houn, Sao Sokha, Muong Sophea, Hem Samin...

Certes, c'étaient d'anciens militaires révolutionnaires, mais ils étaient en charge de la protection du pays. Leur objectif est, maintenant, de libérer le peuple Khmer de cette folie criminelle.

Ce qui fut fait le 7 janvier 1979, avec l'aide de l'armée du Vietnam.

Le 11 janvier 1979, la « République populaire du Cambodge » est créée, soutenue par les Vietnamiens et l’URSS.

Le commandant Hun Sen est nommé ministre des Affaires étrangères. Il est chargé de faire reconnaître ce nouveau gouvernement.

Au mois d'août 1979, les chefs Khmers rouges sont condamnés à mort par les nouvelles autorités gouvernementales.

Mais la communauté internationale désapprouve la mise en place d'un procès, jugé trop expéditif et qui valoriserait le nouveau gouvernementCar les Occidentaux n'acceptent que le Cambodge soit sous la tutelle des communistes Vietnamiens.

Khmers rouges contre le gouvernement khmer (1979 - 1998).

Dès lors, Norodom Sihanouk ne cesse de dénoncer l’invasion de son pays devant l’Assemblée des Nations Unies, à New York, puis à Paris… Sa volonté, son sens politique, son courage et sa ténacité, font de lui, au regard du Monde, le seul homme capable de retrouver la voie de la réconciliation nationale.

Ainsi, un terrible bras de fer commence entre, d'une part, le libérateur, Hun Sen, soutenu par le Vietnam et l'URSS et, d'autre part, le vaincu, Norodom Sihanouk, soutenu par le reste du Monde.

Dès novembre 1979, les Khmers rouges redeviennent le bras armé Norodom Sihanouk sous l'égide de l'ONU ; entrainant une seconde guerre civile pour les cinq millions de survivants qui avaient résisté à la première guerre civile et au génocide.

Tandis qu'à l'ONU, les Khmers rouges, ces montres, ces tortionnaires, ces criminels de guerre, deviennent officiellement les représentants du pays et de leurs anciennes victimes. Pire encore, l'ONU impose un blocus complet du Cambodge, empêchant le pays de se relever et de s'approvisionner en produits de première nécessité.

Un scandale de plus au sein des Nations Unies...

Ainsi, les USA, les Britanniques, les Français et les Chinois arment et financent de nouveau les Khmers rouges.

C'est le début de la seconde guerre civile qui fait rage pendant des années. Empêchant toutes reconstructions, ruinant tous les efforts de paix...

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Le 23 octobre 1991, dans l'espoir de mettre définitivement fin à la seconde guerre civile, les principaux partis procèdent à la signature d'un accord de paix, à Paris, en présence de témoins de 18 pays, dont le Secrétaire général de l'ONU. Les principaux acteurs de cet accord étaient :

  • Le Premier ministre Hun Sen pour le gouvernement Khmer,
  • Le Prince Norodom Sihanouk pour le mouvement FUNCINPEC,
  • Son San pour le Front de libération nationale,
  • Khieu Samphan pour le mouvement des Khmers rouges (Pol Pot) toujours en poste à l'ONU.

Le 24 septembre 1993, la Monarchie est rétablie.

L’Assemblée constituante redonne au pays son statut de « Royaume », et reconnaît la souveraineté du Roi Norodom Sihanouk. Le roi Norodom Sihanouk a alors la pire idée qui soit ! Afin de permettre à tout le monde de sauver la face, il propose de partager en deux chaque administration, chaque ministère, jusqu’à la fonction de chef du gouvernement...

Le prince Norodom Ranariddh, fils aîné de Sihanouk et dirigeant du parti Funcinpec, devient « premier Premier ministre » ; Hun Sen, à la tête du Parti du Peuple Cambodgien est nommé « deuxième Premier ministre ».

Mais comme les Khmers rouges refusent d'appliquer le "cessez-le-feu", les combats continuent jusqu'en 1998 du fait du double jeu de Norodom Sihanouk avec les dirigeants des Khmers rouges.

Norodom Sihanouk et son fil Norodom Ranariddh cherchent toujours l'appuie des Khmers rouges dans le but renverser les forces de Hun Sen.

Le 28 juin 1997, Khieu Samphân annonce la fin définitive du mouvement khmer rouge, sa rupture avec Pol Pot et son soutien sans condition à Norodom Sihanouk et Norodom Ranariddh.

Cet accord précipite les événements, la paix qui semblait s’installer durablement est compromise. Les forces de police et militaires des deux partis s'affrontent dans la capitale Phnom Penh.

D'un côté, les forces de Hun Sen (PPC). De l'autre, les forces du Prince Norodom Ranariddh (FUNCIPEC). Chacun ayant ses propres forces de police et son armée. Les affrontements sont de plus en plus fréquents. Suivis d’exécutions arbitraires, les combats en différents points de la capitale font plus d’une centaine de morts.

En juillet 1997, dans l'esprit des accords de paix et afin de garantir la sécurité du pays, Hun Sen réalise un coup de force contre Norodom Ranariddh pro-Khmers rouges, en évinçant ce dernier du pouvoir.

En septembre 1998, grâce à la politique gagnant-gagnant Son Excellence Hun Sen est élu « l’Unique » Premier ministre, et met fin à la seconde guerre civile. Les affrontements cessent. Le pays retrouve enfin une paix complète ainsi que la prospérité.

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Conclusion.

Certains médias ont, pendant longtemps, entretenu la confusion sur les Khmers rouges, afin de discréditer le gouvernement de Hun Sen de 1979 à 1998 (voire jusqu'en 2023).

Affirmant que les Khmers rouges étaient au pouvoir depuis 1979 !

Des Khmers, c'est certain, d'anciens chefs militaires révolutionnaires, c'est également vrai. Mais des libérateurs qui ont tenté envers et contre tous de rétablir la paix et de reconstruire un pays totalement détruit.

Alors que les Khmers rouges, les vrais idéologiquement parlant (Pol Pot, Khieu Samphan, Ieng Sary, Son Sen...), ceux qui ont toujours soutenus Norodom Sihanouk et furent aidés par les Occidentaux sous l'égide de l'ONU, ce sont eux, qui depuis l'origine du mouvement, ont semé le chaos dans le royaume, jusqu'en 1998. 

Et pour conclure, je dirais que ce fut une longue histoire d'amour et de haine entre Norodom et les Khmers rouges (Pol Pot, Khieu Samphan, Ieng Sary, Ieng Thirith et Son Sen), de 1954 à 1998. Date à laquelle le Roi Norodom Sihanouk gracie tous les anciens chefs Khmers rouges.

Et un jeu de dupes entre Norodom et Hun Sen. Alors que ce dernier tenta, à de nombreuses reprises, de convaincre Norodom Sihanouk de signer la reddition des Khmers rouges et de rétablir la paix... En vain. 


Mais c'était sans compter la volonté des Occidentaux à détourner l'attention sur l'histoire. Ils insistèrent pour qu'un tribunal soit créé afin que les chefs Khmers rouges soient jugés. Ainsi, les Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux du Cambodge sont créées en 2001, et le procès se focalise uniquement sur le génocide. Toute personne qui tente d'apporter des preuves ou, simplement, d'évoquer l'implication des étrangers dans les drames du pays, sont systématiquement écartées, et leurs témoignages refusés.

Les derniers jugements ont été rendus en 2023. Soit 22 ans de procédures, pour un résultat connu d'avance. 

Cette mascarade a permis d'éluder les aides et le contexte international... Malgré tout, les principaux coupables ont été jugés ; tardivement, mais jugés et condamnés.

Alors que les Occidentaux qui les ont soutenus politiquement, financièrement et militairement, n'ont jamais été inquiétés !

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Pour celles et ceux qui souhaitent plus de détails sur les différentes périodes de l'histoire, vous pouvez accéder à mes publications et articles en suivant le lien : Brèves histoires du Cambodge ; notamment une "Brève histoire de la première guerre civile (1955-1979)" et une "Brève histoire de la seconde guerre civile (1979 - 1998)".

Jean-Claude dit Kroussar. 

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